par angèle casanova

ombre

mercredi 26 février 2014

Ailleurs je rôde. Peut-être un peu plus même. Un peu plus qu’en temps normal. Parce que je suis seule. Ailleurs que chez moi. Que je n’ai pas ma voiture. Alors je rôde. Pied ferme. Œil fixe. Je joue à faire comme si je savais où j’allais. Alors que non. Je joue à. Je rôde. Je fais comme si. Et ça me va. Quand mes pieds n’en peuvent plus. Je m’arrête. Pour me reposer. Pour manger. Pour lire. Je n’entre que dans les restaurants et les cafés. Je ne mets le pied dans aucun monument. Aucun musée. Aucun magasin. Je marche. Je rôde. Je pense. Rien d’autre. Pour cette fois.

Pour cette fois, juste sillonner cette ville. Retrouver des éclats d’enfance. Des lieux déjà parcourus. Il y a longtemps. Dans le même manteau bleu. Mais avec presque vingt ans de moins. Je marche dans mes pas. Dans ceux de celle que je fus. Qui n’osait rien. Qui marchait dans l’ombre des murs.

Le temps a passé. Je marche toujours dans l’ombre des murs. Mais c’est un choix maintenant. Je pourrais marcher au milieu des trottoirs. Bousculer mon monde. Pourtant. Je préfère l’ombre des murs. Marcher vite. Filer droit. Mais à l’ombre. Passereau discret filant au vent mon chemin. Ombre sans contours. Sans matière. Je file droit. Le long des murs. Je regarde devant moi. Je sais où je vais. Quoi qu’il arrive. Je sais où je vais. Pour de faux. Je regarde à peine Big Ben. Je m’arrête une heure dans un salon de thé Regent Street. Alors que le soleil brille. Que je devrais être ailleurs. Je m’arrête une heure. Et je lis. Sans lever le nez de mon livre. Je lis. Je vais à contre-courant. Les touristes attendent devant le parlement. Une file interminable, en colimaçon. Je les caresse des yeux en passant. Droite comme un i. La tête très légèrement inclinée vers eux. Je les regarde du coin de l’oeil. Et je passe mon chemin. Je reste à la surface des choses. A l’ombre des murs. Et je me repose.

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