par angèle casanova

un bracelet

jeudi 31 janvier 2008

Je l’ai trouvé comme on trouve un coquillage sur une plage. Par hasard. Et puis, je n’ai pas pu détacher mon regard de lui.

Mon bracelet.

Massif, verni et doux au toucher. Je l’attrape prestement, le retourne d’un coup sec… Il reluit déjà à mon poignet. Je le remonte bravachement, il se transforme en accessoire guerrier. Je me sens cherokee, pour le moins.

Je l’ôte, et le porte à mes yeux. Il a une structure étrange. Assemblage de pièces de bois doré et d’une matière recouverte de ce qui ressemble à des écailles de poisson… Des écailles de poisson ??? J’imagine la récupération des peaux à la sortie d’une poissonnerie. Mais qui a eu l’idée de teindre cette surface écailleuse et irrégulière en mauve ? L’idée me dépasse. Et pourtant, elle me plaît. Infiniment. Mon bracelet ne sent pas le poisson. A-t-il même une odeur ? La mienne, sans doute. Bon. Il sent le propre, quoi. Je ne me lasse pas de le manipuler, de l’observer, de le humer. Chaque observation apporte son lot de découvertes. Peu à peu, je discerne le rythme créé par le bijoutier. Les triangles de bois, dont les nervures, parallèles au bracelet, sont mises en valeur par les écailles, qui courent perpendiculairement, sur la surface triangulaire adjacente. Les triangles eux-mêmes, bois, puis écailles, bois, puis écailles… Triangles, lignes perpendiculaires, et douceur des contours arrondis du large bracelet.

Peu à peu, j’explore la surface polie. Et j’apprends les défauts de la cuirasse, les endroits où le verni hésite, trébuche.

Ma main s’habitue au poids du bracelet. Elle dodeline doucement lorsque je marche. Je me sens belle en sa présence, légère et apprêtée. La douceur de l’objet me contamine.

Lorsque je danse, mes gestes se font plus frénétiques, plus rythmés.

Mais un jour, je le perds.

Amnésie.

Où l’ai-je laissé ? J’ai la fâcheuse habitude de le déposer devant moi lorsque je m’assois. Où me suis-je assise ?

Une semaine passe.

Deux semaines passent.

Toujours rien. Ma main est trop légère. Je me sens nue.

Et puis, aujourd’hui, à midi, je vais déguster des sashimi au restaurant japonais. Je prends mon repas tranquillement. Je règle la note à la caisse, et là, je sens la serveuse hésiter. Elle me regarde, regarde de côté sous le comptoir, et me dit… Ce ne serait pas à vous ? Vous l’avez oublié la dernière fois, non ?

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