par angèle casanova

géolocalisation

vendredi 14 septembre 2012

Gadins et bouts, là. Mon doigt se tend. Je montre l’écran. Dans la conversation, sans l’interrompre. Je me passionne, je gesticule. Une histoire confuse de vases, de faut suivre, de paumés et de liminaires.
Mon doigt se tend. Je montre l’écran.
Géolocalisation.
Besoin toujours encore malgré tout. Ce geste répété m’étonne. M’indispose. Serait-je de l’arrière-garde, 451 et autres cavaliers de la tangibilité ?
Mon doigt se tend. Parce que tout est là. Dedans. Derrière. Dessous. L’écran, l’unité centrale, le clavier. Le mien, mais pas seulement. Le monde derrière chaque écran, chaque unité centrale, chaque clavier. Derrière toutes les machines qui passent à ma portée, cette possibilité. L’ipad de ma voisine de métro. L’ordinateur du médecin, usage médical only. Mon mac book antiquement blanc, écran tâché, sparadrap même couleur à l’angle inférieur gauche, ronronne drôlement, disque dur bientôt mort. Le monde. Tout est là. Derrière. Dessous. Dedans. En parallèle à. En filigrane de.
Bien-être, en ce monde du dedans. Liquide amniotique invisible inodore, mais j’y baigne. Comme un têtard.
Et je montre l’écran. Comme je montrerais ma mère. Avec confiance, abandon. Ce repère est là. Toujours derrière chaque écran. Filigrane. Nervure. Mon corps s’offre aux réseaux wifi. Se laisse traverser, tant pis pour les ondes.
Géolocalisation. Nulle part, partout. Je me dissous me solidifie, perd retrouve ma réalité. Palpitation incessante, diode frénétique. Rien n’est plus rien. Rien est mouvement. Fin du solipsisme, les distances ne sont plus physiques mais d’idées. Les esprits s’affirment, péremptoires, leurs corps disparaissent. Dans une indifférenciation d’avant la naissance.
Bientôt peut-être, je ne montrerai plus d’écran. Je me montrerai moi. Je deviendrai machine. Emettrice-réceptrice. Un pied dans chaque monde, le réel le filigrane. Disparaître, pourquoi pas. Plonger dans cet utérus, m’y perdre. Nager en liberté, tout amarre rongée.
Pur esprit.

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